La voie des Ombres (4)

L'embarcation tanguait dangereusement, ballotée par des vagues matinales agitées. Therde avait tout le mal du monde à ne pas dévier, il se sentait fatigué et seul les poignards de la demoiselle aux oreilles pointues l'empêchait de ne pas piquer du nez. À mi chemin il envisagea de se plaindre de ce traitement, ne voyant pas pourquoi c'était à lui de ramer, mais il se ravisa lorsqu'Eryndel leva un sourcil menaçant au moment où lui ouvrait la bouche. Résigné il acheva le parcours au plus vite.
Le couple de femmes sauta de la barque, plongeant jusqu'à la taille dans une eau transparente mais froide. Le marin fit immédiatement demi tour en pestant tout son saoul contre le monde entier. Il leur fallut cinq bonnes minutes pour rejoindre la plage de sable blanc. Elles contemplèrent silencieusement le bateau prendre le large vers de nouvelles aventures et de vandalisme contre l'empire.

Une fois leurs vêtements secs, la marchombre et sa mère empruntèrent un sentier naturel qui serpentait sur de paisible plaine verdoyante. Elles approchaient de leur objectif, elle le sentait sans pour autant être capable de l'expliquer. L'atmosphère devenait lourde, presque glauque, et une légère brume commençait à recouvrir le sol d'un voile fantomatique. L'herbe se faisait de moins en moins dense, les arbres tortueux manifestaient leur mal être par des contorsions chaotiques et l'éclat du soleil ne tarda pas à être occulté plongeant les aventurières dans une pénombre lugubre. La nature revêtait son costume le plus effrayant, d'étranges silhouettes improbables hantaient le chemin, puis un grognement figea les deux femmes sur place. Deux yeux jaunes clignotaient vingt mètre plus loin. Invisible aux regards inexpérimentés, ces flammèches luisait d'une sauvagerie à peine contenue. Impossible de voir quelle était cette créature recouverte par le brouillard irréel. Même si elles ne prononçaient aucun mots les faëlles réfléchissaient à toute allure pour trouver une solution ou au moins la bonne attitude à adopter devant cet... Plus rien les yeux avaient disparu, le feu de gourmandise qui y brillait s'était volatilisé. La marchombre regarda sa mère plus lugubre que jamais avec une mine inquiète.
- C'était quoi ? Ou est-il ?
Comme pour répondre à sa question, un monstre velu de deux mètres de haut plongea sur Eryndel toutes griffes sorties. Elle ne dû sa survie qu'à ses prodigieux réflexes aiguisés par ces semaines passées à déjoué les pièges de Kael. La faëlle se releva après une roulade souple armes en main. Devant elle, une gueule pourvu de crocs baveux rugit, un animal haut de deux mètre, velu comme un ours, aux extrémités aiguisées tel des poignards.

L'ours élastique car tel était le nom de cette bête issu de la jungle d'Hulm partie en chasse à proximité de l'Oeil d'Otolep, bondit sur une branche avant de se perdre dans les cimes des arbres pour une prochaine attaque en piqueur.
- Maman, court, je vais retenir le monstre !
Eryndel se retourna vers sa maman et elle se heurta au sourire sadique de Kael. Surprise elle prit le coup de poing en pleine figure à lui retourner les vertèbres. Elle s'étala sur le sol, Nezerath avait une fois de plus trompé sa vigilance, depuis le début il avait prit le contrôle du corps de sa mère... était-il trop tard ? Non elle refusait de le croire. Cependant, elle se trouvait face à deux ennemis, Nezerath, sans arme et néanmoins redoutable et cet ours élastique qui pouvait frapper à tout moment l'une des deux faëlle.

Bon. Faisons le point. A droite, l'ours élastique, à gauche, ma mère qui n'est plus, en fait, tout à fait ma mère. D'accord.

"Bien joué, Nézérath, railla Eryndel. Seulement, tu oublies quelque chose.
- Ah oui ? tiens, et quoi donc ?
- L'ours élastique."

Avec un éclat de rire, elle bondit, saisit une branche au passage, et disparut dans les arbres. L'ours élastique grogna, et se jeta sur l'autre Faëlle. Puis une expression étonnée lui passa dans les yeux quand un poids léger tomba sur son dos. Un grognement de douleur suivit : deux lames lui tranchaient la carotide, une autre s'enfonçait dans sa poitrine.

"Je le plaindrais presque." confia Eryndel à Nezerath en sautant à terre avant que l'animal monstrueux ne s'effondre avec fracas. Les deux faëlles rangèrent leurs armes en se souriant, enivrées par cette victoire partagée.
Cette complicité fut de courte durée : presque aussitôt, le sourire de la nécrark se fit cruel. La marchombre comprit le message. Ses lames chantèrent en quittant leur fourreau.
"Bon, écoute bien Nezerath. Tu veux en finir ? Justement, moi aussi. Tu veux me tuer, je veux te tuer, soit. Mais - pour ladernière fois - laisse mamèreen dehors de cette hsitoire !
- Oh ? Et comment te tuerais-je, si je ne possédais son corps ?"
Eryndel frémit. Raté. Tant pis, au moins elle aurait essayé. Il restait une dernière solution...

"Hé bien, attrape-moi, si tu peux !"
Et la jeune femme s'élança dans une course éperdue, jubilant en entendant celle qui aurait dû être sa mère semettre à sa poursuite. Droit vers l'Oeil d'Otolep.

Ça devenait à la fois agaçant et dangereux. La marchombre filait aussi bien sur terre que dans les airs, agrippant des branches basses pour se projeter sur des troncs et rebondir habilement sur des amas rocheux. Kael souffrait de ce corps vieux et usé, qui s'épuisait si facilement, elle n'avait pas d'autre choix elle devait... Y... Parvenir... La mère d'Eryndel disparut une fraction de seconde, récidiva, encore et encore. Eryndel tournait la tête pour voir si elle ne distançait pas trop sa poursuivante plus que par inquiétude. Sentiment qui ne tarda pas à l'envahir lorsqu'elle comprit ce que faisait Nezerath. Sa possession commençait à avoir suffisamment d'emprise pour qu'il parvienne à faire de bref trajet dans les Spires de Ténèbres. Si pour le moment il ne parvenait pas à se maintenir durablement au cœur de ce refuge, il était clair qu'il gagnait inexorablement du terrain. Eryndel devait faire vite, elle accentua la cadence virevoltant de tout son savoir-faire de marchombre. La moindre liane, lui servait à franchir nombre d'obstacles naturels, elle n'hésitait pas à plonger entre deux arbres abattus par une ancienne tempête se glissant dans un trou à peine plus large que sa taille menue. Mais cela ne suffisait pas l'assassin, légendaire ne lâchait pas un centimètre au contraire il en gagnait.

Le soleil était totalement occulté par une brume épaisse, favorisant l'accès aux Spires Nécrarks. Le lieu, emprunt de magie, laissé planer les pierres en suspension dans l'air, elles approchaient du but. Eryndel bondissait sur les cailloux les lus imposants, esquivant ceux qui barrait sa route et chevauchant d'autres plus propices à son avancement. Hélas Nezerath se rapprochait bientôt il pourrait l'attraper... Il disparut subitement. Le Lac se répandait là devant elle, il l'avait laissé venir jusqu'à lui... Elle qui avait toujours œuvrait pour le bien, avait-il renvoyé le Nécrark ? La Dame Blanche réapparut, Eryndel dégaina ses dagues, Nezeraht tordit son poignet droit, elle lâcha sa dague, il la récupéra, s'évapora à nouveau. La Faëlle ne pouvait rien faire contre ce style de combat déloyal elle le savait, elle paniqua, deux mains pâles l'empoignèrent par le col, un coup de genou au ventre la propulsa à deux mètres du sol, elle décrivit un fabuleux salto et plongea dans l'Oeil d'Otolep. Elle émergea para une dague volante, elle voyait à peine la main qui la manipulait, une deuxième coup meurtrier fut dévié instinctivement. Plus rien, Nezerath était là, elle savait, mais il maintenait la pression pour qu'elle se reprenne, doute, succombe à la peur... Quelque chose avait changé.

Était-ce cette gorgée d'eau qu'elle avait nu malgré elle ? Un coup de pied vola au dessus de sa tête, tandis qu'elle se baissait... Elle ne l'avait pas vu venir, elle l'avait ressenti... était-ce le pouvoir du Lac ? Oui, une nouvelle force coulait en elle, l'Oeil d'Otolep lui avait transmis une part de son pouvoir. Elle changea sa posture de combat.
- C'est à mon tour d'attaquer Nezerath !
Eryndel frappa !

Comment exprimer ce qu'elle ressentait en ce moment ? Eryndel se sentait tempête, brume, feu, plus marchombre qu'elle ne l'avait jamais été. Sa vision était plus nette, ses réflexes plus aiguisés, son esprit plus... éveillé. Oui. Eveillée. Voilàle terme qui correspondait le plus à l'état de conscience dans lequel elle se trouvait. Elle avait le sentiment d'émerger d'une longue période de sommeil, comme si son existence n'avait été qu'un long rêve, comme si elle n'avait jamais vu le monde qu'à travers un voile et que l'Oeil d'Otolep avait fait tomber ce
voile.


La marchombre frappa. Le coup était net, précis, vif... en un mot, parfait. Les dagues percèrent les flancs de la possédée sans qu'elle eût le temps de parer. Un instant, la jubilation envahit la combattante : Nezerath n'était plus capable de lui tenir tête ! Puis elle se rappela que sa mère risquait de mourir en même temps, et il ne fallait pas qu'une telle choe advienne. Elle attira violemment la Necrark à elle, et se jeta dans le lac en la serrant contre elle. Adieu, Nézérath pensa-t-elle.
Le deux faëlles sombrèrent dans les eaux magiques de l'Oeil d'Otolep.

Eryndel ceinturait Nezerath de toutes ses forces, l'entraînant dans les profondeurs du Lac. La Nécrark voulut immédiatement se dématérialiser dans ses Spires de Ténèbres, hélas comme pour contrer se fuite, une vive lueur émana là où il n'y avait pourtant qu'obscurité abyssale. Une voix résonna dans son esprit, écrasant Nezerath ui-même de son formidable pouvoir.
- NON !
L'ordre était simple et sa gravité suffit à le rendre irrévocable et absolu à l'image d'une divinité invisible et omniprésente. Nezerath sentait la pression du manque d'oxygène dans ses poumons lui oppresser la poitrine. Son coeur s'affolait, la peur de la mort qu'il ne ressentait pas pour la première fois faisait toujours autant d'effet.
- Non je refuse ! Je refuse de mourir ainsi ! Et ce n'est pas une cuvette pleine d'eau qui va me vaincre ! Tu m'entends ?!
Nezerath se tortilla pour se donner ces quelques centimètres de liberté qui lui permirent d'envoyer un coup de tête à la marchombre. Eryndel libéra quelques grosses bulles d'oxygène lorsque que le front de son ennemi écrasa son nez. Un voile de sang s'écoulait de ses narines, mais elle tint bon. Ce fut le deuxième coup qui la força à lâcher prise. Sa mère, reléguait au rang de simple réceptacle, en profita aussitôt pour remonter à la surface. Sans se soucier de son propre état, elle se lança à la poursuite de la redoutable Dame Blanche.
Nezerath n'était plus qu'à deux mètres d'une bouffée d'air qui assurerait sa survie lorsque qu'Eryndel l'agrippa à la cheville. Sa réaction fut immédiate, elle envoya son talon frapper le crâne de la faëlle. Elle encaissa le choc, saisit sa dague et l'enfonça dans la jambe de sa mère. Nezerath laissa ses dernières réserves d'air s'échapper sous le douleur, avant d'être tracté vers le fond. Les deux corps sombrèrent, Eryndel referma ses bras sur sa mère qui se débattait comme un animal que l'on s'apprêtent à abattre. Non ce n'était pas sa mère et pourtant c'était avec elle, c'était pour elle, qu'elle se sacrifiait.

La surface de l'Oeil d'Otolep fut troublée par quelques bulles pendant une poignée de secondes, avant de retrouver sa paisible stagnation... Tranquillité... Silence... Comme une tombe.

Elles coulaient irrémédiablement. La Faëlle contrôlée par le Nécrark avait cessé de se débattre, et Eryndel sentait ses poumons douloureux brûler par manque d'air. Des taches noires dansaient devant ses yeux. C'était la fin, mais elle réussit à sourire malgré tout : après tout, si elle mourait en ce jour, c'était pour éradiquer Nézérath et sauver sa mère. Ses beaux yeux verts déjà vitreux, elle sombra.

Silence absolu
Ténèbres impénétrables
Inconscience.

Ce furent les derniers mots qui lui vinrent à l'esprit avant que le néant ne l'envahisse....


Eryndel ouvrit les yeux. Tiens donc, elle n'était pas morte, finalement ? Elle inspira profondément et grimaça en sentant ses poumons douloureux protester. Toussant et crachant, elle se redressa péniblement, notant au passage que sa pauvre tête était martelée par une migraine atroce, et regarda autour d'elle. Elle était seule.
Que s'était-il passé ? La jeune marchombre était en train de se noyer avec sa mère, et tout à coup, voilà qu'elle se retrouvait étendue sur la berge du lac...
"Mère ?" appela-t-elle. Elle n'eut pas de réponse, mais n'y prêtait pas vraiment attention non plus, tant elle était absorbée par ses tentatives de reconstituer ce qui s'était produit entre-temps. Sans doute avait-elle été sauvée par sa mère... Oui, mais comment ? Celle-ci avait cessé de se débattre avant qu'Eryndel ne manque d'air, pourtant... Ah, mais elle économisait peut-être son souffle. En tout cas, une chose était certaine : si elle avait pu tirer sa fille du lac, c'est qu'elle n'était plus possédée par Nezerath, et qu'elle était vivante, en principe.

"Mère !" appela encore la jeune femme, en haussant la voix. Pourquoi ne lui répondait-elle pas ?

Eryndel allait partir à sa recherche quand elle crut percevoir un mouvement. Elle espéra que ce n'était pas simplement la brise jouant dans les fourrés ou un animal sauvage...

La bourrasque de vent s'évapora avec l'espoir d'Eryndel de voir sa mère apparaître. La marchombre s'assit sur la plage de galets ovales polis par les doux remous du Lac. Certains planaient tranquillement autour d'elle renforçant la paix qui régnait en maître sur ce lieu magique. Elle contempla le paysage bleuté et embrumé qui s'étendait sous son regard triste, encore sous le choc de la dure réalité qu'elle se refusait d'accepter. Sa mère était morte... Vraiment ? Deux larmes s'écoulèrent sur ses joues, désormais elle serait seule ? Plus personne ne l'attendrait, plus personne ne penserait à elle... Cuian, Kael, sa mère ils étaient tous morts à présent. Elle avait beaucoup trop perdu. Elle se releva, essuya ses joues, se détourna de l'Oeil et repartie vers une destination qu'elle ne connaissait pas encore, elle n'avait pas le cœur d'y aller, mais ses jambes l'y mènerait. Puis elle s'arrêta, se retourna et s'effondra :
- Je refuse ! Je ne veux pas ! JE NE PEUX PAS !!! Je ne peux pas survivre à ça !
La mâchoire crispée, la gorge nouée, les poings serrés à s'en faire saigner la paume des mains... Seul le silence lui répondit.
Elle se recroquevilla sur le elle même, allongée sur le sol, inerte et déprimée. Elle aurait préféré mourir plutôt que de devoir porter ce fardeau.

La surface parfaitement plate du Lac ondula légèrement, le visage d'une jeune femme émergea. Elle était d'une beauté renversante, sa chevelure blanche retombée sur ses épaules. Les gouttes d'eau roulaient sur ses vêtements de cuir noir, moulant une silhouette fine, souple, musclée... D'assassine. Deux dagues serpentines attachées à ses cuisses. Eryndel entendit les galets s'entrechoquer, elle se redressa et resta figée par l'apparition.
- Kael...
La jeune femme déposa le corps inanimé de la mère d'Eryndel. La marchombre s'approcha de son pire ennemi, sa main tremblante caressa le visage de Kael Beleth.
- Ou suis-je ? Qui êtes-vous ? Que s'est-il passé ?
Elle avait perdu son teint pâle, ses yeux affichaient deux iris bleu ciel.
- Je ne me souviens de... Nezerath... Il avait été libéré et puis... Il est entré en moi. J'ai entendu sa voix... Ses menaces avant de sortir de l'eau...
- Il est prisonnier de l'Oeil d'Otolep à présent... Tout est fini Kael.
La mère d'Eryndel toussa, cracha l'eau qui encombrait sa respiration.
- Comment connaissez-vous mon nom ?
- C'est une longue histoire. Tout a commencé le jour où je découvris le Tombeau de Nezerath lors d'une exploration des chaînes du Poll. Le ciel s'assombrissait progressivement, passant du gris argent lumineux qui m'avait accompagné toute la journée au mauve profond...

Le trio s'éloigna de l'Oeil, depuis ceux qui ont eu le privilège de se baigner dans les eaux sacrées de l'Oeil d'Otolep racontent qu'ils ont entendu une voix venant des profondeurs. Elle disait se nommer Nezerath et qu'elle apporterait puissance et immortalité à celui qui la délivrerait. Mais ce n'est qu'une rumeur...

[Et voilà... C'est fini ]

[Nooon pas déjà enfin bon, c'est une fin magnifique, bravo Kael, je ne m'y attendais pas )]

[Ainsi donc, la fête est terminé. Merci Kael pour cette superbe fin, et je crois que maintenant, nous arrivons à la croisé des chemins ]

[Hé oui... ce fut une excellente expérience que de mener notre route tous trois ensemble ^^]

Bravo à vous pour cette quête achevée ! Je pense qu'il est de mon droit de vous récompenser pour ces rp de qualité

- Eryndel obtient une bourse de 50 pièces alaviriennes de 10 étoiles !
- Cuian obtient une sépulture digne des plus grands, d'une valeur de 300 pièces alaviriennes de 10 étoiles. (Oui c'est beaucoup, mais il est quand même mort !) u_u
- Kael Beleth obtient une bourse de 50 pièces alaviriennes de 10 étoiles !

Profitez bien de vos reçus, ils vous seront utiles pour vos petites emplettes personnelles ! (1 étoile de Gwendalavir valant environ 1 euro )
Quant à toi Cuian, puisses-tu reposer en paix ;]